Sud-Ouest Européen n°51

Éditions : Presses Universitaires du Midi
Parution : numéro 51, 24€

ISBN : 978-2-8107-0779-9


Vincent Vlès est professeur des universités émérite en aménagement et urbanisme (Université Toulouse – Jean Jaurès, Certop). Spécialiste des stations touristiques et du tourisme dans les espaces naturels protégés, ses recherches portent sur les mutations touristiques de la montagne et du littoral.


Quelle transition pour les stations pyrénéennes ?

Huit chercheurs dressent un panorama de l’évolution des stations de ski alpin et examinent la manière dont le système productif historique des sports d’hiver se prépare à une rupture forte face au « Triple Big Crunch » dans lequel nous sommes désormais entrés de plain-pied : crise climatique, crise énergétique, crise écologique et sociale.

La trentaine de stations et de stades de neige du versant français des Pyrénées sont devenus des pôles importants de l’économie de ces territoires montagnards (plus de 100 000 emplois dans le ski pyrénéen), parfois les seuls. L’attachement dont sont l’objet ces centres hivernaux est donc compréhensible. Le poids de l’histoire dans la construction d’un modèle pyrénéen particulier, qui oscille entre la quête d’un tourisme de masse et une activité de loisirs de proximité pour des villes et territoires environnants apparaît dans toutes les recherches présentées. Elles illustrent ce que Vincent Vlès développe dans son propre article : la « dépendance au sentier » (Pierson, 2000) des stations de sports d’hiver, c’est-à-dire le poids présent des choix faits par le passé, l’importance de l’habitude des acteurs et la soumission du système économique et politique local aux éclats de l’or blanc. Les articles signés par Steve Hagimont, Jean-Michel Minovez, Glen Buron, Olivier Bessy, Laurent Jalabert ou encore Emeline Hatt apportent des éléments fondamentaux de connaissance sur l’aménagement des stations de moyenne montagne dans les Pyrénées. Partout, un « voyage au bout d’un cul-de-sac » approche, c’est-à-dire que vient le moment où la station devient incompatible avec elle-même. Artouste, le Puigmal, Puyvalador, Hautacam… ont d’ailleurs déjà connu l’approche du « tipping point », ou « point de bascule » vers la fermeture. Les enjeux locaux qui président aux choix d’exploitation ont désormais à tenir compte des enjeux environnementaux globaux qui menacent clairement l’avenir économique des sports d’hiver (Spandre et al., 2019).

Les difficultés de la science à faire entendre ses préventions, l’inertie des stations de ski au moment d’envisager leur reconversion, leur résistance souvent très claire, leur refus à expérimenter des programmes de transition de l’économie des sports d’hiver, révèlent une distanciation, un fixisme qui apparaissent comme autant de résistances de ces territoires de montagne au changement actuel. Les territoires de sports d’hiver ne constituent, assurément, qu’une des multiples illustrations des freins qui s’opposent à la transformation de sociétés et de territoires engagés dans la compétition pour la survie économique, quand c’est à moyen terme la survie tout court qui est en jeu.